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S'eduquer pour eduquer

“Je n’ai aucune peur de dire que mes maîtres, mes spécialistes, mes “livres” sont les garçons eux-mêmes.
Je suis la première à me mettre à leur école.
Qui peut m’enseigner comment les libérer des drames qu’ils ont dans le coeur sinon eux-mêmes?”
Mère Elvira

En ces pages dédiées aux questions éducatives, nous rapportons quelques points simples et concrets pris des catéchèses de Mère Elvira sur l’importance de l’éducation.
Nous croyons que ces réflexions, nées de l’expérience vécue, peuvent nous aider à redonner de l’importance et de la valeur aux gestes simples mais fondamentaux de notre vécu.

Coeurs orphelins
Le drogué ne naît pas tel quel. A un moment donné de la vie, quand passent les seize, dix-huit, vingt ans, les jeunes s’enfuient de la maison, deviennent violents, nous regardent avec des jugements malveillants. Où est le problème? Pourquoi? Parce que nous ne nous sommes pas occupés d’eux quand ils avaient deux ans, cinq ans, dix ans. Et c’est leur “vengeance” parce qu’ils ne se sont pas sentis aimés, éduqués, formés à la vie vraie, à la réalité qu‘est la vie; souvent le centre de nos discordes, de nos préoccupations, de nos disputes étaient toujours et seulement “les sous, les sous, les sous”. Et ils ont utilisé l’argent pour “s’acheter” la mort parce que, au fond, cet argent avait déjà “tué” l’amour en eux et dans la famille. Les parents ne veulent pas et ne savent plus jouer leur rôle de parents, et alors le jeunes vivent avec un coeur, une âme “orphelins”. Ce sont des “orphelins”: ils ont les expressions de la solitude, du mutisme, du coeur morcelé, et ils ne peuvent le dire à personne.
Le Seigneur m’a révélé tout ce mystère de souffrance, de solitude, d’amertume, de tristesse qu’ont vécu vos enfants, avant de se droguer, avec vous parents, et souvent vous ne vous en êtes même pas aperçus. De temps en temps quelqu’un me dit: “Elvira, mais tu t’en prends à nous parents, tu nous culpabilises!”. Pour moi penser ainsi est de l’infantilisme, c’est ne pas vouloir grandir et assumer sa responsabilité d’homme, de femme, de père, de mère. Mais quelle mère es-tu, quel père es-tu si tu décharges tes responsabilités sur tes enfants? Il est nécessaire d’assumer pleinement la responsabilité  de ce que nous sommes aujourd’hui, avec cette attitude du coeur et de l’esprit qui nous fait voir les garçons avec des yeux “justes”, qui nous illumine pour savoir bien les aider, avec cette force et cohérence qu’eux, aujourd’hui, attendent de nous.

La confrontation de la vérité
Nos enfants ont récolté nos limites, nos défauts et compromis, nos trahisons et nos erreurs et pour cela ils sont “à couteau tiré” avec tout et tout le monde. Quand ils sont trahis au-dedans, ils donnent “un gros coup de pied” surtout à leur vie. Ce sont beaucoup de petites choses dont vous ne vous êtes peut-être même pas aperçus parce que, pensez-vous, “mon enfant ne voit pas, ne comprend pas”. Et au contraire c’est nous qui ne les voyions pas, ne les comprenions pas. Si nous avions eu le courage de dire: “Oui, je me suis trompé, j’ai été “stupide”, faible, pardonne-moi”, votre enfant vous aurait pardonné, parce que tous nous sommes pécheurs, même lui l’est. Vos enfants sont meilleurs que vous parce qu’ils sont plus vrais, plus sincères, mais ils n’ont pas trouvé la confrontation de la vérité.
La vérité est que vous n’avez pas été des modèles de vie authentique, sincère. Les enfants ne prétendent pas la perfection des parents, mais désirent la sincérité, parce que le coeur des enfants et des adolescents cherche la confirmation de la vérité, de la cohérence. Mais maintenant ne vous sentez pas coupables, je ne veux pas cela: nous sommes tous pauvres et pécheurs, mais nous devons le reconnaître. Savez-vous pourquoi nous sommes bien ensemble en Communauté? Parce que nous mettons en commun non nos dons, nos qualités, notre sainteté, mais parce que nous mettons en commun “sur le tapis” nos limites, nos défauts, nos plaies ouvertes. Alors cela nous rend compatissants et bons les uns envers les autres, nous rend plus patients, parce que “ton” péché est le mien, “tes” misères sont les miennes. Tous les soirs les garçons, après le chapelet et la lecture de la Parole, s’asseyent en cercle et racontent leur journée, parlent d’eux, partagent. A qui? Aux frères qui vivent avec eux. Ils sont les “maîtres” les uns des autres, le “psychologue” l’un de l’autre.
Nous leur enseignons à se libérer, dans la paix, dans la vérité et dans le pardon, du poids des compromis qui en subsistant à l’intérieur de nous deviennent tristesse, deviennent motif pour fuir. Ce que j’ai fait de mal me tourne dans la tête, occupe mes pensées, “martèle” ma pensée, ma conscience, me dérange... et alors qu’est-ce que je fais? Je m’enfuis! C’est ainsi que tout a commencé: vos garçons devaient vous dire des choses, mais ils n’ont pas su ou pu les dire quand ils avaient douze ans, dix ans, huit ans, parce qu’ils entendaient papa et maman hurler, parce qu’il n’y avait pas de temps pour se dire des choses dans la paix, dans la vérité, dans le pardon. Ils ont tout gardé à l’intérieur, ils ont mâché, avalé, souffert avec colère, avec violence, et ensuite ils se sont enfuis parce qu’ils étaient fatigués, ils n’en pouvaient plus. Le papa n’avait pas le temps pour écouter: ”Tais-toi, je suis fatigué. Que veux-tu? Je travaille toute la journée, je t’entretiens, je rapporte l’argent à la maison!”. Et la maman: “ Ne parle pas, laisse-moi regarder le feuilleton, tais-toi!”. Et tout cela répété une fois, deux, dix... puis, quand ils grandissent, les parents à un moment donné, disent: “Mes enfants ne dialoguent pas”. Mais réfléchis au nombre de fois que tu lui a fermé la bouche, peut-être depuis les premiers mois de vie: déjà petit chaque fois qu’il pleurait tu lui “fermais” la bouche avec la “tétine”. Ensuite, en grandissant, tu as continué en lui répétant toujours: “Tais –toi!”. Là est “né” le drogué potentiel parce que la méfiance, la cassure entre parents et enfants, le mutisme ont commencé.
Autrefois, quand je retournais à la maison en train, j’ai assisté à cette scène: un bambin de quatre ans, tandis que le train roulait, regardait dehors par la fenêtre et appelait continuellement la maman en lui disant: “Maman, maman, regarde quelles belles fleurs!”. La maman était en train de lire un livre, et pendant trois, quatre fois n’a jamais répondu. Ensuite, finalement, elle ouvre la bouche et dit: “Tais-toi un peu, laisse-moi tranquille!”. En moi-même, je pensais: cet enfant grandira et quand il aura quinze ans il ne parlera plus avec sa mère, il deviendra “muet”, et alors les parents diront: “Il ne dialogue jamais avec nous!”. Mais on ne lui a pas donné la possibilité de s’ouvrir quand il “parlait”. Vous devez devenir sensibles, vrais, et comme parents avoir le courage de dire: “Qu’est-ce que tu as à me dire?” et lui: “Tu sais, maman, je voulais te dire que l’autre jour, quand tu as répondu si froidement à papa, cela m’a fait mal. Ensuite tu vas partout, tu vas de ci, de là, mais tu ne t’occupes pas de papa, de nous”.
Vos enfants veulent voir des parents avec des yeux lumineux, souriants, en paix avec eux-mêmes, unis. Ils désirent seulement vous voir heureux: leur vie est dans votre joie!
(d’une catéchèse de Mère Elvira)

“La crédibilité de l’éducateur est soumise au défi du temps, est mise constamment à l’épreuve et doit être continuellement reconquise. La relation éducative se développe tout au long du cours de l’existence humaine et subit des transformations spécifiques dans les différentes phases”.
Conférence Episcopale Italienne – Eduquer à la bonne vie de l’Evangile

Les blessures ont commencé à l’âge de sept ans, quand mon père a été arrêté. Cela a fait crouler tout ce que je vivais de beau dans nos rapports, je n’avais plus confiance en lui. Beaucoup de colère a commencé à grandir en moi, je vivais avec beaucoup de détachement, comme si je n’avais pas de père. Bien que ma mère ait cherché à nous enseigner la prière, les valeurs chrétiennes, une discipline, mes frères et moi nous avons toujours pris des routes erronées, chacun de nous faisait ce qu’il voulait. A dix ans, j’ai commencé à fréquenter des amis plus âgés que moi, qui m’ont fait connaître le monde: la rue et  les fausses valeurs de la vie. Je n’allais pas à l’école, je disais beaucoup de non à ma famille et je faisais beaucoup de sottises. Ma première drogue a été la cigarette à l’âge de onze ans, jusqu’à arriver à l’héroïne, qui a ruiné ma vie en tout, jusqu’au moment où j’ai demandé de l’aide à ma mère: elle a été forte, elle s’est unie avec mon père et par l’intermédiaire d’un prêtre, j’ai connu la Communauté. J’ai commencé tout doucement à croire et à prier pour ma famille. Quand j’ai vu mes parents pour la première fois, je voyais qu’il y avait quelque chose de différent; nous nous sommes demandé pardon pour de nombreuses erreurs que nous avons faites. La chose qui m’a le plus étonné a été de voir mon père qui priait: lui n’a jamais prié, il n’allait pas à la Messe depuis je ne sais combien d’années. Le voir prier m’a rempli le coeur de joie et m’a donné la force d’aller de l’avant.
Emilio

Ce parcours ensemble avec mon fils Amando m’aide à changer ma façon de vivre, me fait voir beaucoup de choses qu’avant je ne voyais pas, spécialement dans la sphère familiale. Autrefois je ne réussissais pas à parler avec mes enfants, je gardais tout à l’intérieur de moi, j’étais un “ours dans une caverne”. Je ne communiquais pour rien et mes enfants – je le comprends aujourd’hui – se demandaient si je leur en voulais. Mon fils pensait: “Il a peut-être quelque chose contre moi parce qu’il ne me parle jamais! Je ne sais pas ce que j’ai fait de mal pour avoir un papa qui ne me regarde jamais!”. Au contraire moi je ne pensais vraiment rien de tout cela, je tenais tout pour acquis: “C’est mon fils, je travaille, je lui fais du bien, et lui m’aime”. Non, ce n’est pas ainsi! Je sens que je dois dire à beaucoup de parents qu’ils ne doivent pas seulement prendre soin d’eux “extérieurement”, mais les aimer plus, être plus proches d’eux, avoir le temps d’écouter leurs problèmes, demander et ne pas tenir tout pour acquis. “S’il y a quelque chose, mon fils vient me le dire”, pensais-je, mais ce n’est pas vrai parce qu’il ne te dit rien si tu ne l’écoutes pas. Aujourd’hui je cherche à parler avec mes enfants, à avoir un dialogue, toujours aidé par mon épouse. Tout doucement je suis en train de changer grâce à la prière et aux groupes de parents.
J’ai eu aussi le don de faire une expérience en Communauté avec mon fils. Cette période à Lourdes m’a beaucoup plu parce que j’ai pu partager avec lui beaucoup de choses qu’avant, pendant des années, nous ne nous étions jamais dites.
papà Gianpaolo

Ce n’est pas facile quand ton enfant entre en Communauté, parce que tu te remets en question comme parent et tu dois mettre de côté l’orgueil et accepter “ l’échec” éducatif. Nous avons eu confiance dans la Communauté parce que nous ne nous sommes pas sentis seuls. Nous avons confié notre fils parce qu’il avait la mort dans le coeur et nous, nous ne pouvions plus l’aider. Nous nous sommes remis en question en commençant un chemin avec lui, en allant aux rencontres avec les autres familles. Petit à petit nos fragilités ont émergé, non seulement de couple mais individuelles, que nous avons inévitablement transmises à nos enfants. Avec l’aide du groupe de parents, qui est très uni, nous sommes en train de les surmonter grâce à la prière et à la foi que nous avons redécouverte, cette foi que je ne croyais pas qu’elle puisse me resoulever. Aujourd’hui je me sens un parent nouveau, une mère ressuscitée et plus crédible.
mamma Cinzia

Les enfants m’ont enseigné, jour après jour, comment les éduquer, en m’éduquant principalement moi-même à être cohérente et vraie. Pendant ces années de mission au Pérou, j’ai eu une expérience particulière avec une enfant d’un an et demi, qui était un peu “spéciale”. Tout de suite j’ai eu des difficultés à construire une amitié avec elle. Elle le sentait: quand je la changeais et la lavais, elle m’observait en silence, comme si elle attendait une parole, un geste d’affection que je ne réussissais pas à lui donner. Quand elle embrassait, elle embrassait tout le monde sauf moi. Son geste m’a fait comprendre qu’elle avait besoin aussi de mon amour et que je devais faire le premier pas. Ainsi j’ai cherché à ouvrir davantage mon coeur dans mes relations avec elle et elle l’a senti tout de suite, tellement qu’elle m’embrassait chaque fois qu’elle me voyait durant le jour, parce qu’elle se sentait enfin aimée. Cette expérience m’a aidée à grandir, à ne pas me donner de limites dans l’amour. J’ai compris que l’enfant a besoin de petits gestes, d’un sourire, d’une embrassade, d’écoute pour se sentir aimé et ainsi croître dans la confiance en soi-même et dans les autres.
Soeur Daniela

Dès l’enfance j’ai souffert beaucoup du malaise familial parce que je voyais toujours mes parents se disputer, on ne respirait pas un air de paix et de sérénité. Cela m’a conduite à grandir dans la tension, à vivre beaucoup de peurs, à m’enfermer en moi-même et à être très insécurisée. Même à l’école je cherchais toujours des points de référence plus forts et je me cachais derrière les autres. A l’âge de quatorze ans, quand mes parents se séparèrent et que mon père partit de la maison, une forte rebellion s’est déclenchée en moi: je me sentais abandonnée et je pensais que c’était de ma faute. Ma mère, suite à la séparation, tomba dans une forte dépression et la situation devint très difficile. Je me sentais responsable aussi de mes soeurs parce que je les voyais souffrir et ainsi, pour me rebeller contre tout cela, je faisais semblant de rien, je “fuyais” vers quelque chose qui pourrait  m’apporter le bonheur. Je passais plus de temps hors de la maison, je n’écoutais plus l’éducation de ma mère, je cherchais la figure paternelle, je cherchais toujours de nouvelles compagnies. Ma vie était faite seulement d’amusement et d’alcool. Même à la maison je n’avais plus aucun rapport avec ma famille, on vivait seulement le mutisme, on ne se parlait plus, je ne me sentais pas comprise. Je voyais que ma mère cherchait par tous les moyens de m’aider, mais moi, je refusais son aide parce que j’étais tellement enragée aussi bien contre elle que contre mon père.
En entrant en Communauté je ne pouvais plus cacher la vie que je menais. Je me suis rendu compte que j’avais besoin d’aide et c’est cela qui m’a fait aller de l’avant. En vivant en fraternité, avec l’aide des  soeurs, j’ai senti un accueil sincère, j’ai retrouvé la beauté et la chaleur de la famille, des rapports humains sincères, de se vouloir du bien dans les petits gestes, de savoir s’aider dans la vérité. J’ai reçu de la Communauté la grâce de vivre beaucoup d’années à Lourdes et je vois que là  la Madone m’a reconstruite comme femme. J’ai vraiment compris, à travers la souffrance qu’on voit à Lourdes, la valeur de la vie.
Pamela

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