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Vendredi 17

Témoignage de Mariapia Bonanate  |  De l’homélie du Cardinal Christoph Schönborn  | 

Enseignements et homélie
du Cardinal Christoph Schönborn
Archevêque de Vienne


Loué soit Jésus Christ !
Chère Mère Elvira, chers frères et sœurs, j’ai tellement de choses dans le cœur à vous communiquer sur la miséricorde de Dieu, sur « Miséricorde et vérité se rencontreront » que je ne sais pas si trois heures me suffiraient.  Je voudrais commencer avec deux scènes de l’évangile.  Le contraste entre la miséricorde de Jésus et la miséricorde des disciples me touche toujours beaucoup..  Je me retrouve souvent dans la miséricorde des disciples et je me découvre presque effrayé devant la miséricorde forte, exigeante, mais vraiment miséricordieuse de Jésus.  Je prends deux exemples de l’Evangile : le premier est dans le sixième chapitre de l’Evangile de Marc, quand les disciples sont envoyés par Jésus deux par deux pour la première mission.  Jamais seuls : ceci est une des règles fondamentales de l’Evangile.
Personne ne peut annoncer l’Evangile tout seul, toujours à deux parce que, comme dit Saint Grégoire le Grand, on ne peut pas se pratiquer la charité à soi tout seul, nous avons toujours besoin au moins d’un autre avec qui vivre la charité, donc, Jésus les envoie deux par deux.  Quand, ils reviennent à la maison de cette première mission, Jésus leur dit : « Venez, allons dans un lieu solitaire, où vous pourrez vous reposer un peu », parce qu’il y avait tellement de personnes qu’ils n’avaient même pas le temps de manger.  Alors, ils sont partis avec une barque sur le lac de Galilée pour aller dans un lieu solitaire, mais les gens les ont vu partir et ils ont marché le long du lac et ils sont arrivés avant Jésus.  A l’arrivée, ils se trouvaient probablement à Tabga, le lieu de la multiplication des pains.  Quand Jésus voit cette foule, il s’émeut, plein de compassion parce « qu’ils étaient comme des brebis sans pasteur ».
Le terme grec est “splanchna” qui veut dire les entrailles, en hébreu, c’est « rahimim », « rechem », qui est le ventre maternel ; Jésus était ému jusqu’au fond de sa vie, de son être, comme une femme est émue dans ses entrailles pour son enfant.  En voyant la foule, il était plein de compassion et de miséricorde parce qu’ils étaient comme des brebis sans pasteur et Marc ajoute : « Et Il se mit à leur enseigner beaucoup de choses ».  Il a enseigné toute la journée.
Ce qui me touche beaucoup c’est que la première miséricorde de Jésus est de donner la Parole de vie, d’enseigner beaucoup de choses et toute la journée ces cinq milles personnes, sans compter les femmes et les enfants, écoutaient Jésus qui les enseignait.  Il enseignait le chemin de la vie.
Maintenant, nous pouvons voir la miséricorde des disciples, voyons comme ils étaient miséricordieux : « Comme déjà l’heure se faisait avancée, les disciples, s’approchant de Lui, disaient : L’endroit est désert et l’heure est déjà avancée, renvoie donc les foules afin qu’elles aillent dans les villages voisins s’acheter de quoi manger ». Matthieu dit qu’ils ont dit à Jésus : « Renvoie les gens ! ». Moi, je soupçonne qu’à la fin de cette longue journée, ils sentaient un certain vide, un vide qui s’appelle faim, et ils voulaient finalement avoir la paix.  Ils sont venus dans ce lieu solitaire pour avoir un peu de paix, de repos, de vacances, pour être seuls avec Jésus et voilà qu’il y a toute cette foule ; c’est pour cela qu’ils disent : « Renvoie la foule ! ».  Voilà la miséricorde des disciples.  La foule vient pour voir Jésus et les disciples la renvoie : quand je fais mon examen de conscience d’Évêque, de prêtre, je médite souvent sur ceci.  Mais Jésus leur donne une réponse impossible : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! ».
Alors on peut voir dans l’Evangile la réaction des apôtres : “Mais tu es fou !”, ils ne disent pas comme ça dans l’Evangile, mais ils l’ont certainement pensé. « Tu es fou, nous devons aller acheter pour deux cents deniers de pain et leur donner à manger ! ». Deux cents deniers, c’était le salaire annuel d’un travailleur.  Mais eux n’ont pas d’argent, ils n’ont rien.  Et Jésus leur dit : « Donnez-leur vous-mêmes à manger ! ».  Jésus demande des choses impossibles ; la miséricorde de Jésus nous semble souvent excessive, impossible.  Comment fait-il ? Ce que Lui attend de ses disciples est vraiment impossible tandis que ce qu’eux désirent et disent est plus compréhensible : « Nous voulons avoir la paix, renvoie cette foule ! ».  La Miséricorde que Jésus nous enseigne est difficile mais c’est la seule vraie.  Et je vous offre un deuxième exemple, où la miséricorde de Jésus nous paraît très dure.  Dans le chapitre quinze de Matthieu, Jésus encore une fois se retire avec les apôtres : ceci est un mouvement important dans la vie de Jésus, il se retire avant tout, pour la prière. 
Sainte Thérèse d’Avila disait : «  Lâche tout, mais ne lâche pas la prière ».  Jésus, parti de là, se retire dans la région de Tir et de Sidon, une zone païenne, parmi les païens, et voilà une femme Cananéenne, une païenne originaire de ces villages, qui criait : « Aie pitié de moi, Seigneur, Fils de David, ma fille est malmenée par un démon ! ».  Combien de parents ici présents peuvent comprendre ce cri de la pauvre femme païenne : « Ma fille est fort malmenée par un démon », mais Jésus ne répond rien, même pas un mot.  Comment est-ce possible : Jésus n’est-il pas touché par la souffrance de cette femme ? Pourquoi ne répond-il pas ?
Alors, nous voyons les Apôtres comme ils semblent miséricordieux : “En s’approchant, les disciples le prièrent : exauce la”. Ils voient la peine de cette mère, et supplient Jésus : « Donne-lui ce qu’elle demande, exauce la » et ils ajoutent immédiatement la raison pour laquelle ils sont si miséricordieux : « Exauce-la parce qu’elle nous poursuit de ses cris ». Voilà la miséricorde des disciples, ce n’était pas la réponse à la misère de la femme, de la mère qui suppliait Jésus pour sa fille, mais c’était : « Cette femme qui nous poursuit tellement de ses cris, qu’elle se taise ! ». Je pense que beaucoup d’entre nous, Évêques, nous avons peur de ces cris des journaux, des masses médias qui nous poursuivent de leurs cris et alors, nous voulons que Jésus résolve tous les problèmes pour avoir notre paix, pour être tranquilles, mais cela n’est pas la miséricorde de Jésus ! 
La Miséricorde de Jésus va beaucoup plus loin.  Jésus répond : « J’ai été envoyé pour les brebis perdues de la maison d’Israël ».  Jésus lui dit : « Je suis venu pour les juifs, je suis juif, je suis le Messie d’Israël, je ne suis pas venu pour vous, païens, ce n’est pas mon travail, vous ne m’intéressez pas ! ».  Quelle dureté !  Alors que fait cette femme ?  Elle vient se prosterner devant Lui et dit : « Seigneur, secours-moi ».  Elle continue à hurler sa misère, sa compassion pour sa fille. Et Jésus qu’est-ce qu’il répond, qu’est-ce qu’il dit ? « Ce n’est pas bien de prendre le pain des fils et de le jeter aux petits chiens », aux chiens.  Un mépris complet.  La dureté de Jésus est terrible, comment peut-il agir comme ça ?  Mais cette femme ne se laisse pas impressionner par l’apparente dureté de Jésus et elle dit : « Oui, Seigneur, tu as raison, c’est vrai, nous sommes païens, je suis une pauvre païenne, je n’ai aucun droit au pain qui est pour les enfants, mais les petits chiens aussi se nourrissent des miettes qui tombent de la table des maîtres ».  Et maintenant, Jésus ne peut plus dire non, elle a gagné : « Femme, ta foi est grande !  Qu’il te soit fait comme tu veux ». 
A ce moment-là sa fille fut guérie.  C’est quoi cette miséricorde de Jésus ?  Il semblait seulement dur, mais dans sa divine miséricorde, vraiment divine, il a conduit cette femme à un acte de foi fantastique, une foi totale, il n’a pas donné tout de suite comme nous sommes tentés de le faire : résoudre tous les problèmes, tout de suite ; ce n’est pas de la miséricorde !  Jésus fait cheminer dans la foi, il fait cheminer cette mère dans la souffrance jusqu’à ce qu’elle comprenne : « Je n’ai aucun droit que toi, Jésus, tu viennes à mon secours et guérisse ma fille ».  Mais elle a un désir qui ne se désiste pas devant la difficulté, devant l’apparent insuccès de ses demandes.  Voilà la miséricorde de Jésus.  Je vous invite à faire quelques pas pour entrer davantage dans la compréhension de la miséricorde de Dieu à travers la Parole de Dieu et l’expérience humaine dont vous êtes riches. 
Qu’est-ce que la miséricorde en réalité?  Où est la limite, la frontière entre miséricorde et légèreté, entre miséricorde et injustice ?  Parfois, la sévérité est plus miséricorde que de tout permettre : « everything goes », nous disons comme cela aujourd’hui ; tout est possible, tout peut se faire : ce n’est pas de la miséricorde.  Les parents qui permettent tout à leurs enfants, ne sont pas miséricordieux, ils ont la miséricorde des disciples, ils ne veulent pas que les enfants les poursuivent avec leurs cris.  Et pour cela, ils leur donnent de l’argent, l’ordinateur, ils les mettent devant la télévision… mais ce n’est pas de la miséricorde.  L’amour supporte beaucoup mais exige aussi beaucoup. 
Aujourd’hui, nous vivons dans une époque de darwinisme social.  J’ai étudié beaucoup cette question et j’ai fait des débats publics et toujours sur ce point : est  ce vrai ce qu’a dit Darwin ?  Que le plus fort survit, que c’est cela la loi de la nature, la survie du plus fort ?  Gare aux faibles, gare aux pauvres !  Si ceci est le modèle de la société, gare à nous !  La psychologie aujourd’hui dit souvent : tu dois te faire valoir, tu dois être important, tu dois te réaliser.  La miséricorde est considérée comme faiblesse, comme quelque chose qui ne sert pas au succès, à notre vie, au moi. 
Friedrich Nietzsche, ce pauvre grand philosophe, a dit que le christianisme est la religion des faibles et que la miséricorde pour lui est un Dieu misérable, que les chrétiens sont des hommes inférieurs, parce que la miséricorde affaiblit l’homme, le rend impuissant.  Ensuite, il y a le soupçon que la miséricorde puisse humilier les autres.  Si tu es miséricordieux, moi, je suis plus haut et tu es en bas.  Mais d’un autre côté, j’entends beaucoup de fois le reproche que l’Eglise est sans miséricorde.  Combien de fois, j’ai dû entendre cela !  Par exemple, sans miséricorde avec les divorcés remariés.  Alors, je dis toujours : regardez ce que Jésus a fait quand ils lui ont demandé : « Mais Moïse nous a permis de renvoyer la femme, de donner un acte de divorce ».   Qu’est ce que Jésus répond ? « C’est à cause de la dureté de votre cœur, que Moïse vous a donné la permission de répudier vos femmes ».  A cause de la dureté du cœur !  Quand j’entends dire « l’Eglise est sans miséricorde », je demande : « Mais vous parents, qui avez divorcé, avez-vous été miséricordieux envers vos enfants ? Qui a fait souffrir les enfants ?  Pourquoi avez-vous fait porter le joug de vos conflits sur les épaules de vos enfants ? Qui manque de miséricorde ? ».  Et souvent, il y a un moment de silence. 
L’Eglise est la seule, la seule de notre société qui défende le mariage !  Qui défend les faibles que sont les enfants, qui ont besoin de parents.  Et je le dis parce que le mariage de mes parents a raté, j’ai connu le divorce de mes parents.  Un des plus beaux moments de ma vie et aussi le plus dur aussi, fut quand les jeunes, dans une école, m’ont demandé : « Cardinal, quel a été le moment le plus dur de votre vie ? ».  J’ai été un peu surpris par cette question et spontanément, sans réfléchir, du fond de mon cœur, j’ai répondu : « Le moment où j’ai su que mes parents allaient divorcer ».  Il y a eu un silence total et tous ces jeunes écoutaient.  Ensuite, j’ai ajouté : « Mais vous savez, j’ai fait aussi l’expérience de la beauté de la réconciliation.  Mes parents ne se sont pas retrouvés, mais ils se sont réconciliés.  Et papa, avant sa mort -il avait un cancer - est venu à la maison pour célébrer le dernier Noël de sa vie en famille ».  Si nous faisons l’expérience de la miséricorde de Jésus, de Dieu, de son pardon, c’est vrai que les blessures restent, les cicatrices des blessures restent mais il y a une vraie guérison, il y a quelque chose de plus qui est la nouveauté du pardon.  Pour ceci, peut-être que le Seigneur permet que nous passions à travers de nombreuses souffrances, pour faire la connaissance de la grandeur de sa miséricorde.  Oui, l’Eglise est miséricordieuse.  Mais en quoi consiste la miséricorde ?  Avant tout, la miséricorde est le cœur  le plus intime de Dieu lui-même.  La Miséricorde de Jésus ne vient pas des idées, des sentiments, mais jaillit directement du cœur du Père.  Jésus nous dit : « Je vous dis ce que j’ai entendu, ce que j’ai vu de mon Père ». 
C’est la traduction en gestes et en paroles humaines de la miséricorde du Père lui-même.  Et pour cela, Jésus a dit : « Qui me voit, voit le Père ».  Quand nous voyons la miséricorde de Jésus en acte, concrète, nous voyons le Père, nous voyons Dieu.  Pour dire la miséricorde en hébreu, il y a deux termes et ceci est très intéressant.  Le Pape Jean-Paul II a fait une très belle méditation sur cela dans l’Encyclique « Dives in Misericordia ». Ce sont deux mots, « khesed » et « rehem ».  « Khesed» est la fidélité, « rehem » est le ventre maternel.  Et le Pape Jean-Paul explique que ces deux aspects sont comme la fidélité d’un père et la tendresse d’une mère.  Ces deux choses font partie de la miséricorde de Dieu : l’aspect masculin et l’aspect féminin.  Chers amis, comme nous avons besoin de pères aujourd’hui !  Pères.  Nous avons besoin de la khesed, de la solidité, de la fidélité du père.  Et il me semble que c’est un grand manque de notre société d’aujourd’hui, dans notre vie et nous en avons tellement besoin.  Je me souviens quand le Pape Jean-Paul II est mort : il y avait une foule immense, on disait quatre millions de personnes, qui ont voulu voir le cercueil du Saint Père à Saint Pierre. 
Il y avait une très longue file sur la place Saint Pierre, les personnes ont attendu quinze, seize heures pour passer un petit instant devant le cercueil du Pape.  Moi, comme Cardinal, j’ai pu passer tout de suite.  Je n’ai pas attendu des heures, je l’admets : le couvre-chef rouge est « le passeport » à Rome.  Mais j’ai demandé à beaucoup de jeunes : « Mais pourquoi faites-vous cela, toute cette fatigue pour attendre ? » et tout le monde m’a répondu : « Lui était un père, nous avons perdu un père, nous voulons le remercier ».  Cette paternité du Pape Jean-Paul et d’une façon plus cachée et réservée aujourd’hui, celle du Pape Benoît : nous en avons vraiment besoin !  Moi, je connais très bien le Pape Benoît, depuis trente-sept ans : j’ai été son élève et son étudiant à Ratisbonne, quand j’étais professeur et ensuite, j’ai pu être proche de lui pendant de nombreuses années quand il a travaillé pour le nouveau Catéchisme.  Je peux dire et témoigner que c’est un homme d’une grande humilité, d’une grande simplicité.  J’ai demandé une fois à la concierge du palais de la Congrégation quand il est arrivé comme nouveau préfet : « Comment est-il ce Cardinal allemand ? ».  Elle m’a répondu : « C’est un vrai chrétien ».  Quel beau témoignage cela : « C’est un vrai chrétien ! ». 
Si vous n’êtes pas trop fatigués demandons- nous d’un peu plus près, même philosophiquement, en réfléchissant un peu, en creusant le cerveau : « Qu’est-ce que la miséricorde ?  Est-ce une attitude naturelle ou surnaturelle ?  Est-ce une chose humaine ou seulement une attitude chrétienne ? ».  Ce Nietzsche, philosophe allemand qui a lutté toute sa vie avec Dieu et contre Dieu, a dit une phrase terrible : « Les faibles et les mal réussis doivent périr !  C’est le premier principe de notre amour pour les hommes.  Et dans un tel but on doit aussi aider à les faire disparaître.  Qu’est-ce qui est plus nocif que n’importe quel vice ?  La compassion, le christianisme ! ».  Cette façon de dire nous semble exagérée mais quand on voit la vague en faveur de l’euthanasie, aujourd’hui, c’est vraiment la religion du plus fort qui s’affirme : faire disparaître les faibles.  La demande de l’euthanasie est l’exacte attitude de ce que Nietzsche appelle (pour protester contre le christianisme) « le premier principe de notre amour pour les hommes ».  La lutte pour l’euthanasie est devenue, au moins en Europe, la lutte exemplaire de cette fausse miséricorde qui ne supporte pas de voir la souffrance.  Un de mes collègues d’école, qui est devenu médecin, me disait : « Parfois, les petits-enfants viennent demander : « Docteur, notre grand-mère souffre tellement, elle est tellement malade, avec un cancer, elle souffre beaucoup, docteur, vous ne pouvez pas… l’aider afin que finisse cette souffrance ? ».  Alors, il lui répond « Tuez vous-mêmes votre grand-mère ! ». 
C’est tout à fait clair que l’euthanasie : c’est tuer !  On se donne comme excuse, que le médecin le fasse « humainement ».  « Tuez vous-mêmes votre grand-mère ! », voilà la vérité !  Un autre exemple terrible : le syndrome de Down, la trisomie 21.  Aujourd’hui, on peut faire un diagnostic déjà dans le ventre de la mère, pas avec certitude, mais avec probabilité.  Alors, le médecin dit à la maman : « Votre enfant est peut être trisomique 21 ».  Qu’est-ce que cela veut dire ?  Vous pouvez le tuer si vous voulez, avortez !  Et la pauvre maman est sous  une pression terrible.  Ils ont éliminé de notre société deux tiers des enfants trisomiques 21.  Deux tiers de ces enfants ont disparu.  Pourquoi ?  Pas parce qu’ils sont guéris, mais parce qu’ils ont été tués dans le ventre maternel.  C’est la triste miséricorde de notre société : tuer un malade incurable. 
La miséricorde de Jésus a un autre fondement.  Il existe un fondement naturel à la miséricorde : nous avons tous une attitude naturelle à avoir compassion des souffrants.  Une maman quand elle voit son fils malade, elle a compassion, c’est naturel.  Et nous disons spontanément que c’est inhumain de ne pas avoir de compassion pour son propre enfant.  Mais d’un autre côté, cette compassion aujourd’hui ne suffit plus, parce qu’il y a une grande pression d’un autre type de compassion, de fausse miséricorde.  Une pression telle que nous avons besoin d’une vigoureuse aide d’en haut.  Parce que l’ennemi, le diable, se cache derrière cette fausse miséricorde.  Pas par miséricorde mais par haine envers l’homme.  Et pour cela, nous avons besoin de la force du Christ.  La force naturelle ne suffit pas pour embrasser le lépreux comme le faisait Jésus.  Embrasser un lépreux est impossible. 
Ne pas détourner les yeux devant la misère de nombreux jeunes qui souffrent de la lèpre de la drogue, de l’alcool, est pénible.  Nous avons besoin d’une force plus grande que la seule force naturelle parce que la nature repousse et se refuse à voir trop de mal. 
Voyons alors la question miséricorde pour tous ou seulement pour certains ?  Il y a une parole scandaleuse de Jésus, quand il était à Nazareth, son village natal, où il avait grandi, et où beaucoup de ses concitoyens attendaient qu’il fasse des miracles.  Et Jésus dit : « Il y avait beaucoup de lépreux en Israël au temps du prophète Elisée mais aucun ne fut guéri, à part Naaman, le syrien, le païen ».  La miséricorde est pour tous ou seulement pour certains ?  Jésus n’a pas guéri tout le monde, quelques fois, il en a guéri l’un ou l’autre.  C’est un dilemme évident.  Mais il y a une réponse et nous la voyons ici.  La miséricorde n’est pas abstraite, Jésus ne nous demande pas d’aimer l’humanité, mais d’aimer le prochain. 
L’Evangile le plus évident sur ceci, est celui du Bon Samaritain.  Jésus n’a pas demandé que nous fassions l’impossible, nous ne pouvons pas guérir toutes les blessures du monde, mais nous pouvons voir le prochain qui est tombé entre les mains des brigands.  Nous pouvons faire comme les deux ecclésiastes, le prêtre et le lévite qui sont passés outre ou nous pouvons faire comme le bon samaritain.  Qu’est-ce que cela veut dire ?  Certes, la Communauté Cenacolo ne peut pas résoudre tous les problèmes de drogue dans le monde.  Ça veut dire alors que nous laissons tout tomber, qu’il n’y a plus rien à faire ?  Non, la miséricorde est concrète.  Les parents avec leurs enfants, avec la croix, la souffrance, la patience, la prière, peuvent ressusciter.  Ne pas passer outre de ce blessé le long de la route : ceci est la réponse de Jésus. Cette réponse a un effet très concret, elle est contagieuse parce que, je le vois ici concrètement avec mes yeux, c’est possible de renaître, de recommencer à vivre. 
Alors, c’est cette miséricorde que vous avez tous vécue expérimentée : c’est la miséricorde de Jésus.  Et, dernière question, mais qu’adviendra-t-il de ceux que je ne peux pas aider ?  Notre réponse est : il y a le Seigneur ! Il y a le Seigneur !  Et nous pouvons avoir confiance que si nous avons été l’objet de la miséricorde de Jésus, Jésus ne manquera pas non plus de miséricorde pour les autres. 
Je termine avec les quatre-vingt-dix-neuf brebis que le Bon Pasteur laisse dans le désert, pour aller chercher la centième perdue.  Parfois, je me suis dit : « Cette attitude du Bon Pasteur est irresponsable !   Laisser quatre-vingt-dix-neuf brebis pour aller en chercher une ».  Mais ceci a un effet étonnant.  Si, grâce à Dieu, je suis parmi les quatre-vingt-dix-neuf et que je vois que le Bon Pasteur va chercher la centième brebis perdue, jusqu’à la trouver et la ramener à la bergerie, je peux me dire : « Si un jour, moi aussi, j’étais une brebis perdue, je suis sûr que ce pasteur viendra me chercher et me sauver ».  Ceci est la bonne nouvelle, c’est l’Evangile.  Merci de m’avoir écouté avec patience ! 

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